A Gouarec et dans sa région, la population connait bien la légende de Conomor et l'endroit maudit du Bonnet Rouge qui recèle encore aujourd'hui les vestiges d'un ancien fort situé dans le bois de Gouarec, sur un promontoir rocheux dominant le Blavet, à la confluence de celui-ci avec le ruisseau du Pouldu.
Le Bonnet Rouge, vallée du Blavet |
Le lieu est cité dans un document ancien, le Cartulaire de Redon (871) dans lequel il est clairement nommé Castelcran. Ce document fait état du passage à cet endroit du roi Salomon (cousin de Nominoë et successeur d'Erispoë son fils, après l'avoir assassiné), venu rendre un jugement dans une affaire d'usurpation de terres par le tyern Alfret ou Auffret au détriment du monastère de Saint Ducocan.On sait donc que la forteresse existait encore à ce moment là (vers 870).
Ce fort a fait l'objet de fouilles au XIXe siècle par de Keranflerc'h-Kernezne, mettant à jour une monnaie d'argent frappée au Mans, à l'effigie d'Erispoë (851-853). Des traces d'un incendie violent ont également permis d'estimer la destruction de cette forteresse à la fin du IXe siècle, probablement par les Normands.
Castel Cran sur la crête au fond, surplombant le Blavet |
Il semble à propos de Conomor que de nombreuses communes en Bretagne revendiquent son lieu de résidence, en particulier dans le Finistère. On peut donc penser qu'il s'agissait d'un personnage important vivant vers le milieu de VIe siècle. Les Historiens de cette époque (Chronique de Réginon et surtout "Historia Francorum" de Grégoire de Tours) confirment bien l'existence de ce personnage contemporain du roi Childebert, fils de Clovis mais c'est à peu près la seule certitude à propos de Conomor. En Armorique, les informations sur cette époque passent par les Légendaires bretons qui donnent à travers les "Vies de Saints" une image magnifiée et de fait partiale des vies en question. Ce qui émane toutefois de l'ensemble de ces textes (Vie de St Mélar, St Samson, St Malo, St Lunaire et surtout St Gildas), c'est que ce personnage est un obstacle à la montée en puissance de l'église bretonne qui va succéder au pouvoir et à l'organisation impériale héritée de l'occupation romaine. On peut donc penser que ce personnage, peut-être également chef de la Domnonée insulaire (Marcus Conomorius)était un païen, adversaire déclaré de l'Eglise (J.Markale; voir à ce sujet l'article de Goulven Péron: cahier du Poher n°36 de mars 2012).
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