Les ruines de Saint Hervé ou Ahouarnou en Guendol, au bout d'un nouveau chemin...
En prenant le contre-halage depuis le bourg de Plélauff (à l'écluse) on peut accéder par temps sec aux ruines de la chapelle de Saint Hervé en Guendol, un édifice remarquable par la qualité de son bâti, aujourd'hui en ruine et dont j'avais déjà parlé sur ce blog le 19 décembre 2021.
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Vue côté Nord à l'arrivée du nouveau chemin |
Ces ruines intriguent l'amateur d'architectures anciennes pour plusieurs raisons, dont son emplacement qui la rend invisible dans le paysage, la qualité de sa construction, tout-à-fait exceptionnelle ici, son histoire atypique qui retient l'intérêt et que l'on cherche à creuser....
Cette chapelle serait l'oeuvre de l'Abbé Claude de Guiller, famille détentrice des biens de Guendol et d'une grande partie de Gouarec au XVIe et XVIIe siècle. Claude de Guiller devient abbé commendataire de l'abbaye de Bon Repos en 1620 et jusque 1628. C'est probablement à cette époque ou peu avant qu'il fait construire Saint Hervé dans cette ancienne carrière de granodiorite.
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Façade Sud et entrée principale |
Selon l'architecte du patrimoine, Léo Goas de Pluvigner (56) qui s'était engagé avec l'association Breizh Santel dans la sauvegarde de ce monument, il y a une quinzaine d'années maintenant, cette chapelle aurait d'abord été construite sur les bords du Doré et vers la confluence du petit et du grand Doré. Elle aurait été déplacée à l'endroit actuel par décision des autorités religieuses de l'époque pour des raisons liées à un usage anormal ou déviant de l'édifice comme la réalisation de messes noires dans cette chapelle qui se trouvait alors dans la même disposition que celle de la Pitié, un peu plus en amont de la rivière, érigée elle, par les Boutteville de Coatcouraval.
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Détails de larmier et plinthe sur contrefort |
Il est donc possible que la première chapelle construite près des rives du Doré ait subi les conséquences des guerres de religion qui ne s'achèvent qu'en 1598 sous Henri IV.
Toutefois, la maçonnerie de cette chapelle Saint Hervé s'adapte parfaitement au dénivelé du sol dont la plinthe moulurée ceinturant le bas des murs marque parfaitement les variations, ce qui tend à démontrer une réalisation des murs spécifique à l'endroit et non un déplacement de l'édifice antérieur. Cette adaptation ornementale a également pu être réalisée à partir des matériaux de l'édifice précédent qui venaient sans doute du même endroit. Le choix de placer la chapelle dans cette carrière et donc pratiquement invisible dans le pays devait avoir un sens précis. La supposition faite le plus souvent en parlant de cette chapelle est qu'elle devait servir à une population de gens malades et contagieux, mais aucune preuve n'a encore été apportée à cette hypothèse.
Autre élément exceptionnel venant de cette chapelle, le jubé de Notre-Dame de la Croix en haut du bourg de Plélauff, un mobilier qui était encore dans la chapelle Saint Hervé en 1839 et placé dans la chapelle N.D.de la Croix au XXe siècle parcequ'elle faisait à quelques centimètres près, la même largeur.
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Entrée dans le pignon Ouest |
Enfin, le côté "bipolaire" de cette chapelle est unique dans le pays: son entrée Ouest donne sur une nef sans la moindre ouverture et limitée par le jubé aux 7 péchés capitaux et une entrée très ornée Sud donnant sur un choeur fortement éclairé par trois grandes verrières en arc brisé, limité par le jubé aux sept vertus cardinales. La lumière d'un côté et les ténèbres de l'autre.... de quoi alimenter la réflexion des passants et donner envie d'en savoir un peu plus sur cet endroit étrange ou dorment encore quelques secrets.
Le nouveau chemin pour y accéder n'est pas très simple à trouver pour des marcheurs habitués au balisage standard; la difficulté est de traverser la zone humide qui longe la contre allée du canal, traversée sur des rondins de bois et sur des talus, un tracé qui n'est utilisable qu'en période estivale ou de bas niveau d'eau. L'écluse la plus proche de l'endroit est celle de Guendol.