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dimanche 13 juin 2021

La tranchée du canal à Glomel, Côtes d'Armor

Inquiétante image d'abandon à la Tranchée du canal, dite aussi "Tranchée des bagnards" en Glomel, Côtes d'Armor.

Tranchée des bagnards: 06/2021

 Le canal de Nantes à Brest possède un tronçon costarmoricain qui présente la particularité de disposer d'une tranchée de raccordement de deux bassins versants, et donc deux directions opposées d'écoulement des eaux: celui du Blavet par son affluent  le Doré vers l'Atlantique: vers l'Est ici, et le bassin de l'Aulne vers l'Ouest. La séparation des eaux qui se fait  à 184m d'altitude, a nécessité le creusement d'une tranchée de raccordement d'un peu plus de 3kms de longueur, réalisée par des bagnards (déserteurs militaires condamnés). Ce travail titanesque va durer 9 ans, pour obtenir un ouvrage qui n'est pas une simple tranchée mais un véritable chef d'oeuvre hydraulique avec régulation des eaux par le barrage du Corong. L'ouvrage de 3 kms  fait 100m dans sa grande largeur pour 23m de profondeur. C'est donc plus de 3 millions de m3 de terre qui seront déblayés à la pelle et à la pioche, c'est-à-dire à la main par quelques 4000 bagnards qui vont se succéder sur ce chantier pendant ces années (1825-1834).On retrouve la trace de 112 décès sur les régistres de cette époque, un nombre sans doute sous-estimé.

Selon l'Ingénieur des Travaux Publics Emile Guyomard, bien connu des anciens rostrenois, la livraison officielle à la navigation du canal s'est faite le premier janvier 1842 avec une facture s'élevant à 45. 500.000 Francs-or, la partie dans les Côtes du Nord (aujourd'hui Côtes d'Armor) étant la plus coûteuse du tracé, du fait du relief (multiplication des écluses et de la tranchée avec pourtant une main d'oeuvre  contrainte au coût limité à sa survie: extrait de la brochure SIVOM Rostrenen du 02/1983).

Contreforts inversés*: 06/2021
Si l'on prend comme référence le site Wikipedia, c'est un montant de 160 millions de Francs-or de 1860 qui correspond au prix de l'ouvrage aux 364kms et 238 écluses (une 17bis à Redon).
Aujourd'hui, le piéton ou le cycliste qui passe sur le chemin de halage peut s'étonner d'un tel état d'abandon pour un patrimoine historique de cette importance et dont il faut hélas constater que seule, la partie costarmoricaine n'est pas navigable. Les multiples arbres tombés dans le canal accélèrent l'envasement général et l'asphyxie du milieu aquatique. L'alimentation en eau de la tranchée n'est plus régulée et certaines parties des berges se sont effondrées dans le lit du canal. Ce triste constat pourrait sans doute donner une image du Département que même la restauration des écluses entre Bon Repos et Mellionnec ne suffit plus à positiver. Peut-être que la prise de conscience de l'intérêt d'une préservation des espaces sensibles comme cette ancienne voie de navigation couplée à la sauvegarde du patrimoine historique d'une telle importance se traduira par une volonté clairement affichée de concentrer les efforts où ils seraient nécessaires.
*: les contreforts inversés sont destinés à retenir la berge et ici, le chemin de halage afin d'éviter l'effondrement dans la voie d'eau.


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